octobre 2023
isbn 978-2-84809-380-2
90 pages
15 x 20 cm
18 €
isbn 978-2-84809-380-2
90 pages
15 x 20 cm
18 €
Si tu croîs, Maïs
Pascale Ruffel
Alma vit aux pieds du volcan Cerro Calcinado au Guatemala. La fin est proche, elle le sent. Alors, elle pense au fils qu’elle a mis au monde bien des saisons plus tôt et qu’elle n’a pas vu grandir. Sans papier et sans crayon, elle lui écrit de ses yeux qui se posent sur le gris du ciel, sur le drap bleu du lac ou sur les planches centenaires de la cabane de Rosita. Par delà la profondeur de l’océan et au-delà des mots perdus, il l’entend.
« Si tu croîs Maïs, si tu pares la tombe de tendres épis, le vent complice apportera des graines de coquelicot. Car le vent souffle les rêves. Les fleurs pourpres, éclatantes pousseront libres et légères. Le jaune doré se mêlera au rouge radieux, ils inonderont le sol de leurs reflets. Tu seras honoré, Maïs. À toi, je peux faire cette demande car toi et moi, tu le sais bien, nous parlons la même langue. »
Pascale Ruffel est l’autrice d’un premier ouvrage paru chez joca seria en 2017 : Les Ancêtres ne prennent pas l’avion puis, en 2019, de Touché, coulé chez le même éditeur.
Pascale Ruffel
Alma vit aux pieds du volcan Cerro Calcinado au Guatemala. La fin est proche, elle le sent. Alors, elle pense au fils qu’elle a mis au monde bien des saisons plus tôt et qu’elle n’a pas vu grandir. Sans papier et sans crayon, elle lui écrit de ses yeux qui se posent sur le gris du ciel, sur le drap bleu du lac ou sur les planches centenaires de la cabane de Rosita. Par delà la profondeur de l’océan et au-delà des mots perdus, il l’entend.
« Si tu croîs Maïs, si tu pares la tombe de tendres épis, le vent complice apportera des graines de coquelicot. Car le vent souffle les rêves. Les fleurs pourpres, éclatantes pousseront libres et légères. Le jaune doré se mêlera au rouge radieux, ils inonderont le sol de leurs reflets. Tu seras honoré, Maïs. À toi, je peux faire cette demande car toi et moi, tu le sais bien, nous parlons la même langue. »
Pascale Ruffel est l’autrice d’un premier ouvrage paru chez joca seria en 2017 : Les Ancêtres ne prennent pas l’avion puis, en 2019, de Touché, coulé chez le même éditeur.
adrienmeignan
Pour ma cinquante-sixième note de lecture, je vous parle de Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel paru aux éditions Joca Seria.
Dans le livre Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel, on entend la voix d’Alma, vieille femme maya qui vit au pied du volcan Cerro Calcinado au Guatemala. Elle est l’une des dernières à parler la langue aguateco. Ce qu’elle dit, elle l’adresse à son fils qui vit au-delà des montagnes, au-delà de ce qu’elle peut rêver. Ce fils est parti vivre dans une autre famille juste après l’accouchement. Cette histoire résonne avec force dans ce livre, mais ce qui résonne plus fortement est la capacité d’interprétation de la littérature quand elle se permet d’allier fiction et réalité.
Pascale Ruffel vit à Nantes, elle est psychologue clinicienne auprès des réfugié·e·s. Elle a publié deux autres livres parus également aux éditions joca seria. Pourquoi a-t-elle écrit une telle histoire ? La réponse se dévoile légèrement au cœur du livre, par la reproduction d’un papier administratif, et cela suffit à ancrer le livre dans une démarche artistique pertinente. Ce document est un formulaire de consentement d’adoption signé d’une croix et d’une empreinte digitale par la mère. Cette trace de réel dans le livre vient consolider ce que la voix d’Alma dit dans ce livre, que ce soit de la fiction ou du réel.
L’authenticité du document ne fait aucun doute. Pascale Ruffel nous fait entendre cette femme qui a laissé cette simple croix et cette empreinte digitale en bas du document. Elle lui donne une voix et une langue. Nous pourrions n’avoir aucun intérêt pour ce qu’elle raconte, même si elle vient d’un pays lointain que certain·e pourrait qualifier de l’affreux terme « exotique ». Après tout, il existe énormément d’histoires d’accouchement et d’adoption à travers le monde. Mais ici, l’écriture restitue le personnage d’Alma avec une densité incomparable et son discours nous touche avec intensité.
Le Guatemala de Si tu croîs, Maïs est autant un territoire de fiction qu’un élément de réalité. Pascale Ruffel a modifié certaines choses, mais fait référence à des événements bien réels, comme l’épisode douloureux de la guerre civile autrement appelé « violenca », qui dura de 1960 à 1998. L’autrice décrit ce pays par la force de l’évocation. Les paysages, les couleurs et les saveurs sont amplifiés pour emporter le·la lecteurice non pas dans un caractère « exotique », mais dans le territoire de la fiction où nous sommes plus sensibles pour entendre le discours d’Alma.
Pascale Ruffel nous rappelle, avec Si tu croîs, Maïs, qu’écrire un roman est une interprétation du monde et que cela permet aux lecteurices de s’ouvrir à sa pluralité. L’émotion que procure un tel livre n’est évidemment pas la même que l’on peut avoir dans notre réalité. Pourtant, je suis certain qu’à travers les mots d’Alma, j’ai entendu des mots que des femmes ayant vécu une histoire similaire auraient pu me confier. Je suis même persuadé que la lecture de Si tu croîs, Maïs m’a permis d’être beaucoup plus sensible aux thèmes de la maternité, de la filiation et de la mémoire.
Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel est l’un de ces livres qui m’incite à garder espoir dans la littérature. C’est ici ma dernière note de lecture pour 2023 et je ne pouvais espérer meilleur livre pour me diriger vers la nouvelle année. C’est un livre qui possède un souffle incroyable et une écriture d’une grande richesse. Pascale Ruffel s’inscrit parmi les grandes découvertes littéraires que j’ai faites en 2023. Désormais, j’ai plus que jamais envie de découvrir d’autres livres de cette autrice, mais aussi de continuer à mieux appréhender le monde par la force de la littérature.
Pour ma cinquante-sixième note de lecture, je vous parle de Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel paru aux éditions Joca Seria.
Dans le livre Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel, on entend la voix d’Alma, vieille femme maya qui vit au pied du volcan Cerro Calcinado au Guatemala. Elle est l’une des dernières à parler la langue aguateco. Ce qu’elle dit, elle l’adresse à son fils qui vit au-delà des montagnes, au-delà de ce qu’elle peut rêver. Ce fils est parti vivre dans une autre famille juste après l’accouchement. Cette histoire résonne avec force dans ce livre, mais ce qui résonne plus fortement est la capacité d’interprétation de la littérature quand elle se permet d’allier fiction et réalité.
Pascale Ruffel vit à Nantes, elle est psychologue clinicienne auprès des réfugié·e·s. Elle a publié deux autres livres parus également aux éditions joca seria. Pourquoi a-t-elle écrit une telle histoire ? La réponse se dévoile légèrement au cœur du livre, par la reproduction d’un papier administratif, et cela suffit à ancrer le livre dans une démarche artistique pertinente. Ce document est un formulaire de consentement d’adoption signé d’une croix et d’une empreinte digitale par la mère. Cette trace de réel dans le livre vient consolider ce que la voix d’Alma dit dans ce livre, que ce soit de la fiction ou du réel.
L’authenticité du document ne fait aucun doute. Pascale Ruffel nous fait entendre cette femme qui a laissé cette simple croix et cette empreinte digitale en bas du document. Elle lui donne une voix et une langue. Nous pourrions n’avoir aucun intérêt pour ce qu’elle raconte, même si elle vient d’un pays lointain que certain·e pourrait qualifier de l’affreux terme « exotique ». Après tout, il existe énormément d’histoires d’accouchement et d’adoption à travers le monde. Mais ici, l’écriture restitue le personnage d’Alma avec une densité incomparable et son discours nous touche avec intensité.
Le Guatemala de Si tu croîs, Maïs est autant un territoire de fiction qu’un élément de réalité. Pascale Ruffel a modifié certaines choses, mais fait référence à des événements bien réels, comme l’épisode douloureux de la guerre civile autrement appelé « violenca », qui dura de 1960 à 1998. L’autrice décrit ce pays par la force de l’évocation. Les paysages, les couleurs et les saveurs sont amplifiés pour emporter le·la lecteurice non pas dans un caractère « exotique », mais dans le territoire de la fiction où nous sommes plus sensibles pour entendre le discours d’Alma.
Pascale Ruffel nous rappelle, avec Si tu croîs, Maïs, qu’écrire un roman est une interprétation du monde et que cela permet aux lecteurices de s’ouvrir à sa pluralité. L’émotion que procure un tel livre n’est évidemment pas la même que l’on peut avoir dans notre réalité. Pourtant, je suis certain qu’à travers les mots d’Alma, j’ai entendu des mots que des femmes ayant vécu une histoire similaire auraient pu me confier. Je suis même persuadé que la lecture de Si tu croîs, Maïs m’a permis d’être beaucoup plus sensible aux thèmes de la maternité, de la filiation et de la mémoire.
Si tu croîs, Maïs de Pascale Ruffel est l’un de ces livres qui m’incite à garder espoir dans la littérature. C’est ici ma dernière note de lecture pour 2023 et je ne pouvais espérer meilleur livre pour me diriger vers la nouvelle année. C’est un livre qui possède un souffle incroyable et une écriture d’une grande richesse. Pascale Ruffel s’inscrit parmi les grandes découvertes littéraires que j’ai faites en 2023. Désormais, j’ai plus que jamais envie de découvrir d’autres livres de cette autrice, mais aussi de continuer à mieux appréhender le monde par la force de la littérature.